Dans un communiqué publié le 14 Août dernier , la ministre des enseignements secondaires Pauline Nalova Lyonga a interdit l’organisation des cours de vacances sur toute l’étendue du territoire tant pour les établissements privés que publics
1- Mr Kaffo Fokou, comment avez-vous apprécié cette nouvelle ?
Réponse : Diversement.
- La motivation de la décision apparaît assez faible même si le contexte peut la faire comprendre. La lutte contre la covid-19 ne saurait justifier à elle seule une telle interdiction, puisqu’elle n’a pas empêché la reprise des classes en juin ni l’organisation des examens.
- Il y a cependant, explicitement et implicitement dans le texte, des motivations suffisantes.
- Règlementairement, c’est un rappel à l’ordre par rapport au respect de l’arrêté conjoint MINEDUB/MINESEC portant périodes d’interruption des cours qui a d’ailleurs subi de nombreuses modifications cette année en raison de la covid-19. Il s’agit ici au fond d’un appel au respect d’un principe d’organisation de l’activité et du temps scolaires qui est fondé scientifiquement et dont les objectifs sont :
- Permettre aux élèves de passer à d’autres formes d’apprentissage directement liés à la vie d’où la référence aux valeurs sociales et culturelles
- Enseigner intrinsèquement l’organisation et la structuration du temps comme facteurs d’efficacité dans tout ce que l’on fait
Ce texte aurait cependant gagné à être plus clair et précis sur certains aspects et on peut le regretter. L’interdiction devrait viser clairement les administrations scolaires, leurs infrastructures et leurs enseignants. Si ces administrations organisent des cours de vacances, ces cours deviendront ipso facto systématiques et obligatoires et violeront
- Les droits des élèves aux vacances ;
- Les droits des enseignants aux congés annuels
- Cette nouvelle ne va-t-elle pas impacter sur les élèves des classes intermédiaires qui depuis le mois de mars sont à la maison ?
Je ne pense pas que nous prenons le problème par le bon bout. La covid-19 a impacté douloureusement l’année scolaire 2019-2020 surtout pour les élèves des classes intermédiaires. D’éventuels cours de vacances peuvent-ils corriger cela ? Je dis partiellement et inégalement. De nombreux enfants ne pourront pas participer aux cours de vacances, parce que rien ne les y oblige, parce qu’ils sont déjà en vacances ailleurs ou dans d’autres activités, parce qu’ils n’ont pas le moyen de se les payer, une infinité de raisons existe. Il faut donc trouver une autre solution au problème. C’est pourquoi nous en appelons aux différents ministres de l’éducation de faire tenir compte au courant de l’année qui vient, dans l’élaboration des programmes, des 20% des programmes non couverts au cours de l’année qui s’achève.
- Comment les parents peuvent-ils rattraper cette situation dans le cas ou leurs enfants seraient dans le besoin de ces cours ?
Il y a toujours eu des cours de vacances et cette liberté-là existe toujours à mon avis. Il s’agit seulement de l’encadrer pour éviter qu’elle ne se transforme en contrainte pour les élèves et les enseignants. Les droits des uns et des autres pour les vacances et les congés doivent être respectés. Les institutions qui répondent de l’école et de son organisation pour l’Etat ne doivent pas être les acteurs de la violation de ce droit. En dehors de cela, d’autres formes d’organisation des cours de vacances, avec d’autres acteurs dans d’autres cadres restent, à mon avis, tout à fait libres.
- La rentrée académique en octobre prochain avec cette pandémie du coronavirus, comment vous la voyez?
Je la vois difficile et pleine de dangers. Il y aura des difficultés d’infrastructures : en moyenne statistique, il faudra 19 salles et 273 tables-bancs en plus par établissement. Nous sommes déjà en retard sur la réalisation de ces objectifs dont les fonds sont prévus dans les fonds anti-covid. Il faudra également beaucoup d’enseignants supplémentaires et rien n’est encore prévu nulle part pour cela. Au final, nous courrons le risque de voir l’année scolaire 2020-2021 s’organiser comme d’habitude avec 80 à 120 élèves par classes et tant pis pour le corona virus.
- Le gouvernement prévoit faire des cours à mi-temps pour les élèves, quel est votre avis sur cette potentielle solution ?
Les cours à mi-temps, cela suppose une double vacation pour les enseignants. Mon avis là-dessus est clair et net : ce n’est pas pensable d’imaginer que l’on puisse doubler le quota horaire hebdomadaire des enseignants et atteindre par exemple les 38 ou 40h par semaine pour les professeurs des collèges et des lycées. Il faut penser à un système à double flux où deux enseignants se divisent la même classe au primaire, où deux groupes d’enseignants se partagent la même classe au secondaire. Pour cela, il faudra plus d’enseignants et c’est déjà le moment d’y penser.