Éducation au Cameroun : le MINFOPRA révèle une hémorragie qui met l’avenir en péril.

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Depuis le 18 novembre 2024, chaque jour, 11 enseignants sont licenciés ou révoqués de la fonction publique camerounaise.

Le Ministère de la Fonction Publique (MINFOPRA) a annoncé ce 5 mars 2025 une nouvelle vague de licenciements et de révocations au sein de la fonction publique camerounaise, touchant une fois de plus durement le secteur de l’éducation. Sur les 238 agents concernés, 202 sont des personnels éducatifs, soit 85%. Cette vague vient s’ajouter à une série de révocations massives d’enseignants qui depuis novembre 2024, porte à plus de 2157 le nombre total d’agents révoqués ou licenciés dans le cadre du Contentieux de l’Opération de Comptage Physique des Personnels de l’État (COPPE), dont une majorité écrasante d’enseignants (1184), soit 55%.  

Si l’opération COPPE vise à assainir les finances publiques en luttant contre l’absentéisme et en réduisant la masse salariale, elle met en lumière une réalité bien plus inquiétante : la désertion massive des enseignants camerounais. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : depuis le 18 novembre 2024, ce sont en moyenne 11 enseignants qui quittent chaque jour la fonction publique, soit un toutes les 2 heures 10 minutes.

A cette hémorragie déjà préoccupante, il faut ajouter les départs à la retraite. Le Ministère des Enseignements Secondaires annonçait le 2 décembre 2024 le départ en retraite de 1868 enseignants pour la seule année 2025. En extrapolant ces chiffres à l’ensemble du système éducatif, on peut estimer que plus de 16 enseignants sont soustraits chaque jour des effectifs du personnel éducatif, sans compter ceux qui vont en retraite dans les autres ministères éducatifs.  

Cette situation alarmante s’explique par les conditions de travail difficiles, les injustices et le manque de reconnaissance dont souffrent les enseignants. Confrontés à des classes surchargées, à un manque de matériel pédagogique et à une absence de perspectives de carrière, beaucoup d’entre eux choisissent de se tourner vers d’autres secteurs, voire d’émigrer à la recherche de meilleures conditions de vie.  

Les conséquences de cet exode massif sont désastreuses pour l’avenir du Cameroun. La pénurie d’enseignants se fait déjà sentir (projectée à 6000 de plus pour l’année 2025), conduisant à des classes encore plus surchargées et à une baisse de la qualité de l’enseignement. Le ratio élèves/enseignant, déjà très élevé (70 élèves par enseignant dans le primaire public en 2023, selon l’annuaire statistique de l’INS), risque de s’aggraver, compromettant les chances de réussite des jeunes générations.  

Le Cameroun, qui ambitionne d’atteindre l’émergence en 2035, ne pourra réaliser cet objectif sans un système éducatif performant et des enseignants motivés. Il est urgent d’investir massivement dans l’éducation, de revaloriser la profession enseignante et de mettre en œuvre des réformes ambitieuses pour redonner à l’école camerounaise son lustre d’antan.  

Les syndicats d’enseignants tirent la sonnette d’alarme depuis des années, réclamant une réforme profonde du système éducatif et un nouveau statut pour la profession enseignante. Ils appellent à plus de justice salariale avec les autres corps de la fonction publique, notamment par la revalorisation du point d’indice et le déplafonnement indiciaire de 1140 à 1500 ou 1600. Ils réclament également l’amélioration des conditions de travail, la mise en place d’un véritable plan de carrière et une formation continue de qualité.  

Il est temps que les autorités prennent conscience de l’urgence de la situation et engagent les réformes nécessaires pour sauver l’éducation camerounaise. L’avenir de nos enfants en dépend.

Roland ASSOAH/ SGE SNAES.

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