- PRIVATISATION DE L’EDUCATION
- Quel est l’état des lieux concernant la privatisation dans votre pays ?
Il est variable en fonction des niveaux d’enseignement :
- Au préscolaire, il est très élevé : 58,4% des établissements sont privés
- Au primaire, il est encore relativement faible : 22,54%
- Au secondaire il atteint déjà le tiers, avec 31,65% d’établissements privés, 28,01% des effectifs d’élèves
(Annuaire statistique du Cameroun 2015)
- Au supérieur, il est déjà très élevé : 31 universités et IPES sur 43, soit 72,09%
(https://www.4icu.org/top-universities-africa/ et https://www.whed.net/home.php )
- Quels sont les lois existantes régissant l’enseignement privé
- La loi 2004/022 du 22 juillet 2004 fixant les règles relatives à l’organisation et au fonctionnement de l’enseignement privé au Cameroun
- La loi du 16 avril 2001 portant orientation de l’enseignement supérieur,
- Le décret n° 2001/832/PM du 19 septembre 2001 fixant les règles communes applicables aux institutions privées d’enseignement supérieur.
- Quels types de privatisation de l’éducation ont lieux dans votre pays ?
- Les établissements privés à but lucratif, laïcs ou confessionnels
- Les établissements communautaires ou de parents
- Quels types d’acteurs privés opèrent dans l’éducation dans votre pays ?
- Communautés religieuses
- Associations des Parents d’élèves
- Grandes entreprises/chaines d’écoles
- Chaines internationales comme Enko Education qui organisent un baccalauréat international en liaison avec une institution basée en Suisse et ayant des établissements dans de nombreux pays africains (Mozambique, Côte-d’ivoire, Afrique du Sud), Maarif Schools of Cameroon (Ecole internationale turque) entre autres.
– Y a-t-il des grandes entreprises/chaînes d’écoles à but lucratif qui opèrent dans l’éducation dans votre pays ? Si oui, lesquelles ?
Oui, ce sont les écoles internationales comme Enko Education, Maarif Schools, écoles américaines, françaises, universités américaines, etc.
– Quels enjeux présente la privatisation de l’éducation dans votre pays ?
De nombreux enjeux : celui de l’égal accès à l’éducation, celui de légal accès aux filières innovantes, celui de l’accès à une éducation de meilleure qualité dans un contexte de clochardisation de l’enseignement public.
- Qu’il y a-t-il d’urgent à faire selon vous pour répondre aux enjeux de la privatisation de l’éducation ?
- La législation doit être modifiée pour faire du droit à l’éducation un droit véritablement opposable à l’Etat ;
- Le niveau du financement de l’éducation doit être revu (en pourcentage du budget mais surtout du PIB et devenir une conditionnalité contraignante vis-à-vis des Etats
- MARCHANDISATION DE L’EDUCATION
- Quel est l’état des lieux concernant la marchandisation de l’éducation dans votre pays ?
Le secteur marchand de l’éducation est en constante progression, au niveau du nombre des établissements privés à but lucratif (privés laïcs comme confessionnels) à tous les niveaux comme vu ci-dessus, avec des pics dans le préscolaire et le supérieur, au niveau de la progression des frais de scolarité exigés qui atteignent plusieurs centaines de mille francs au préscolaire et au primaire et dépassent souvent le million au secondaire et au supérieur (ces frais sont de 2 350 000 à Enko La Gaieté situé à Bastos Yaoundé). Il touche et donc verrouille l’accès des plus démunies aux filières les plus innovantes ou les plus prometteuses (médecine, formations d’ingénieurs, etc.), et devient de ce fait un moyen de reproduction sociale de l’élite politique et marchande. Elle touche même le secteur public de l’éducation par l’introduction dans ce secteur de nombreux frais obligatoires qui en renchérissent le coût et en restreignent l’accès.
- Quels types de marchandisation de l’éducation ont lieux dans votre pays ?
- L’autorisation et la promotion du secteur privé marchand de l’éducation ;
- La mise en place progressive d’un secteur public marchand dans les universités d’Etat sous l’appellation de filières professionnalisantes ;
- L’appel à une contribution de plus en plus élevée des ménages pour suppléer à la réduction continue du financement public du secteur public de l’éducation (contribution des associations des parents d’élèves, frais informatiques, frais de laboratoires, carnets médicaux vendus…)
- Quels enjeux présentent la marchandisation de l’éducation dans votre pays ?
- L’accès à l’éducation se restreint de plus en plus ;
- L’accès à des filières innovantes ou prometteuses devient une sélection par l’argent
- La qualité de l’enseignement public se dégrade continûment, ce qui pousse la demande d’éducation vers le secteur privé à but lucratif
- A la longue, une fracture sociale est en train de se mettre en place à travers une reproduction sociale au profit des diverses élites.
- Qu’y a-t-il d’urgent à faire selon vous pour répondre aux enjeux la marchandisation de l’éducation ?
- Construire un véritable plaidoyer pour l’éducation publique, et pour cela, une étude scientifique pour mettre en lumière le degré de marchandisation du secteur de l’éducation et les conséquences de celle-ci pourrait permettre d’augmenter l’efficacité d’un tel plaidoyer.
- EDUCATION PUBLIQUE
- Quel est l’état des lieux concernant l’éducation publique dans votre pays ?
Elle reste majoritaire notamment dans le primaire et le secondaire mais cette position risque de se dégrader progressivement face à la concurrence du privé à but lucratif qui monte en puissance. L’éducation publique est aussi marquée par la diminution constante de son financement réel, au-delà des chiffres affichés dans les budgets qui ne sont pas souvent réalisés. Et ce déficit de financement impacte la qualité de l’éducation publique négativement.
- Quels sont les grands enjeux concernant l’éducation publique dans votre pays ?
Comme dit plus haut, il s’agit de la démocratisation de l’accès aux savoirs et aux formations, de l’égalité des chances, toutes choses comprises de plus en plus par la restriction de l’accès à l’éducation, de la sélection par l’argent pour l’accès aux filières innovantes et d’avenir, et finalement de la fracture sociale qui s’organise par le biais de l’éducation.
- Quels rapports existent-ils entre l’éducation publique, la privatisation et marchandisation de l’éducation ?
La baisse du financement public de l’éducation entraine la dégradation de la qualité de l’éducation publique, la baisse de son attractivité, et en proportion inverse, l’augmentation de l’attractivité du secteur privé qui du fait de la demande la hausse de la demande dont il est l’objet (loi de l’offre et de la demande), se développe davantage et se renchérissant.
- Qu’il y a-t-il d’urgent à faire selon vous pour répondre aux enjeux de l’éducation publique ?
Il faut des actions fortes, des plaidoyers argumentés, mais aussi des actions syndicales classiques, et donc, la faiblesse générale des syndicats est l’une des causes de l »impuissance des sociétés face à la dégradation de l’éducation publique.
- EDUCATION ET LA PANDEMIE LIEE A LA COVID-19
- Quelle appréciation faites-vous de la gestion du secteur éducatif marqué par la pandémie liée au Covid-19 dans votre pays ?
- Faible suivi du respect des mesures barrières ;
- Faible financement des kits anti-covid (masques, gels, termoflashes, savons, eau coulantes, tests, etc.)
- E-learning inadapté aux différents contextes d’éducation du pays
- Avez- vous noté des situations de marchandisation de l’éducation ? si oui, lesquelles ?
Certains établissements privés en ont profité pour augmenter les coûts de scolarisation pour compenser la diminution d’effectifs imposée en raison de l’impératif de distanciation physique/sociale. Ainsi, dans un établissement privé, les frais de scolarité sont passés de 280 000 à 350 000 FCFA.
- Avez- vous noté des impacts de la pandémie du covid-19 en termes d’inégalités ? si oui, lesquelles ?
- Inégalité d’accès à l’éducation du fait de l’augmentation des coûts d’éducation
- Inégalité d’accès au télé-enseignement en raison de la non disponibilité du matériel de réception, de la faible ou absence de couverture du réseau internet…
- Avez-vous mené des actions en la matière ? si oui, lesquelles ?
Des actions de sensibilisation du gouvernement sur les médias audio et télévisuels, par voie de communiqués écrits.