La Lettre hebdomadaire du SNAES aux Enseignant-es Camarades, collègues,

0
702

En écoutant attentivement ce que nous disons sur les réseaux sociaux, en observant comment nous agissons dans la rue, et prenant en compte le contexte international actuel, ce que nous avons vu en Chine, en Europe et ailleurs, ce que nous avons appris et savons désormais de la virulence et de la violence du Covid-19, je me suis autorisé à prendre la parole en tant que Secrétaire Général du SNAES sur la gravité actuelle et potentielle de ce que nous sommes en train de vivre, comme enseignants – syndicalistes ou pas encore – comme Camerounais, mais aussi comme filles et fils de personnes plus âgées donc infiniment plus vulnérables, comme parents de personnes plus jeunes donc plus résistantes mais aussi plus susceptibles de servir de vecteurs à la maladie. Nous sommes probablement à la veille d’une grande catastrophe nationale. Sommes-nous suffisamment conscients de cet état des choses ? Il me semble que non.

Dans la rue ce matin, sorti pour une urgence, j’ai été sidéré de la normalité du comportement de nos concitoyens, en situation anormale. Sur les réseaux sociaux, malgré les efforts de bien de gens, la légèreté de ton de bon nombre d’autres a de quoi inquiéter. Il semble que chez beaucoup, le sens des priorités soit sérieusement atteint. Alors, rappelons, à chacun de nous, ce qui est prioritaire aujourd’hui : « sauver des vies » ! Tout le reste, quoi qu’on dise, est accessoire. Sauver ne serait-ce qu’une seule vie, c’est immense. Et chacun peut le faire, en respectant les consignes du Gouvernement, des médecins, des spécialistes reconnus d’ici comme d’ailleurs. Une vie, une seule, disais-je. « Une vie ne vaut rien mais rien ne vaut une vie. » disait André Malraux dans Les Conquérants. C’est d’ailleurs un roman de guerre sur l’Extrême-Orient, coïncidence éloquente. En temps de guerre, sachons-le, il ne peut être que suicidaire de se comporter comme en temps de paix : les balles perdues sifflent de partout, et n’importe qui, pour peu qu’il se découvre, peut en attraper une ou plusieurs, mortellement. Dans bientôt, et je ne crois pas être atteint du complexe de Cassandre, des virus de covid-19, crachés comme des balles, vont siffler autour de nous. Nous ne les verrons pas venir, et si nous nous sommes exposés, nous allons en prendre un ou plusieurs, et devenir à notre tour un engin cracheur, un dangereux engin pour notre entourage immédiat. Et ce sera totalement irresponsable, inadmissible. Parce que nous étions prévenus, parce que, en tant qu’enseignants, nous avions le devoir d’enseigner autour de nous ce que nous avions appris et que non seulement nous ne l’avons pas fait, mais nous avons sans doute contribué à induire les autres en erreur, à les mettre en danger.

Bien sûr nous savons que notre gouvernement a complètement raté la stratégie de riposte. Nous avons vu certains hauts dignitaires de notre pays se comporter de manière totalement irresponsable, sans encourir le moindre blâme public. Notre infrastructure sanitaire est en piteux état ; nos ressources publiques anémiées. Personne n’imagine sérieusement que dans une situation, pas invraisemblable, de contagion massive, la prise en charge publique sera à la hauteur. Contaminés, ceux dont le corps ne pourra pas résister mourront chez eux, seuls, abandonnés comme des pestiférés, y compris de leurs proches, ou dans les couloirs et coins désertés des hôpitaux. La seule manière de nous protéger était de fermer les frontières à temps, et on l’a fait à contretemps ; ou de confiner à temps, et on va sans doute le faire à contretemps. Vous voulez que le Premier Ministre vous dise de vous confiner. Il va peut-être finir par vous le dire, mais ce sera sans doute quand vous aurez déjà pris le virus. Ce pays n’est pas moins le vôtre que le sien : vous devez le protéger sans attendre qu’il vous l’ordonne. C’est pour cela que vous avez fait autant d’études, et que vous être devenus enseignant-e, c’est-à-dire une personne digne d’enseigner les autres. Prenez cette tâche au sérieux, acquittez-vous-en avec hauteur, brillez par le bon exemple. Voici ce que le SNAES vous dit cette semaine.

Un pour tous, tous pour un !