INTERVIEW : « Le Cameroun est géré par des gérontocrates assistés de leurs familles et de leurs valets. » accordée à Modeste Mba Talla pour icicemac
Cette interview, accordée en 2009 à icicemac est d’une brûlante actualité. Elle peut être relue avec profit.
Modeste Mba Talla : Roger Kaffo Fokou : qui êtes-vous ?
Roger Kaffo Fokou : Je suis Camerounais, enseignant de formation et de carrière. J’ai fait des études de lettres puis, quand je me suis lancé dans l’action syndicale en 1993, la nécessité m’a amené à y ajouter des études de droit, puis de management. En ce moment, je dirige au Cameroun un syndicat d’enseignants du secondaire, le SNAES (Syndicat National Autonome de l’enseignement secondaire) et assure l’un des trois secrétariats généraux adjoints de la Fédération des syndicats de l’enseignement et de la recherche au Cameroun (la FESER). Je fais également dans le journalisme et en dehors de mes contributions à la presse à grands tirages locale j’assure depuis 5 ans la direction de publication du mensuel La Voix de l’Enseignant, journal qui depuis 8 mois paraît uniquement sur Internet faute de financement. Je consacre une partie importante de mes loisirs à l’écriture et j’ai publié de manière locale Les Générations sacrifiées, un essai qui a fait forte impression, La Ronde des gladiateurs, une galerie de portraits d’hommes politiques camerounais des années 90, Accents aigus, un recueil de poèmes sur l’enfance et sur l’école, puis en collaboration Guide pratique pour la connaissance des droits et des devoirs des enseignantes et des enseignants camerounais, un manuel sur les droits des fonctionnaires de l’enseignement, Mbafung : voyage au cœur de traditions ancestrales (ouvrage collectif). Je suis marié et père de 5 enfants.
Modeste Mba Talla : Vous venez de sortir aux éditions L’Harmattan deux livres? Qu’est ce qui vous a décidé de rédiger «Demain sera à l’Afrique» et «Misères de l’éducation en Afrique: Le cas du Cameroun aujourd’hui» ?
Roger Kaffo Fokou : Un même projet sous-tend les deux ouvrages : celui d’œuvrer à la prise de conscience du fait que les situations du Cameroun et de l’Afrique, loin de relever de la fatalité, sont en fait construites. Ces 25 dernières années, comme enseignant, j’ai été aux premières loges pour voir comment une machine à emboutir, savamment réglée, peut progressivement broyer des générations entières de jeunes camerounais, sous le regard passif ou complice de ceux que l’on appelle les aînés sociaux. C’est un phénomène qui commence à prendre de l’ampleur au début des années 80 et le laboratoire d’expérimentation est alors l’université de Yaoundé. C’est cette situation que je dénonce dans Les Générations sacrifiées. L’expérience syndicale m’a permis d’étendre avec les années mon observation au reste du continent et la similitude des situations m’a frappé. Il m’est alors apparu qu’il devait y avoir un laboratoire central pour mettre au point des programmes à exécuter ici et là sur le continent. Le déficit de formation toutes générations confondues en Afrique, surtout en Afrique subsaharienne, est le plus élevé du monde. Nous sommes pourtant assis sur une montagne de richesses. Les actes que nous posons tous les jours vont-ils dans la bonne direction? En creusant pour répondre à cette question, devant la difficulté qu’il y a à mobiliser mes concitoyens autour d’une action collective d’intérêt général, je me suis mis à émettre des hypothèses et à faire des recherches. Tout cela m’a conduit à produire ces deux livres, l’un sur la problématique du développement de l’Afrique, l’autre sur les scandales de l’éducation au Cameroun aujourd’hui.
Modeste Mba Talla : Votre livre «Demain sera à l’Afrique », est une réflexion sur le devenir de l’Afrique, sur la question de développement. Vous exposez l’idée selon laquelle le développement est d’abord avant tout un problème de civilisation. Est-ce pourquoi le développement de l’Afrique vous amène à revisiter la civilisation africaine, dans ce qu’elle a de fondamental. Quelle leçon faites-vous ?
Roger Kaffo Fokou : Vous savez, lorsque l’on parle de développement en Afrique, l’on songe presque toujours à l’Occident. Le paradigme de développement que propose l’Occident est-il comme le croyait naguère le penseur américain Francis Fukuyama une voie obligée pour toute civilisation désireuse de sortir de la misère ? La contradiction que lui porte le monde musulman depuis le VIIè-VIIIè siècle dans tous les domaines et plus spécifiquement dans les domaines religieux et financier, contradiction qui semble s’être radicalisée depuis le 11 septembre 2001, est là pour nous interpeler à une prudente réflexion. En scrutant au plus profond d’elle-même, de sa civilisation, en prenant acte des différences fondamentales qui séparent celle-ci de la civilisation occidentale gréco-romaine et judéo-chrétienne, n’est-il pas possible pour l’Afrique de repartir à nouveau et de façon originale ? Il y a là une tâche urgente pour nos intellectuels à qui il suffit d’emboîter le pas à des précurseurs de génie parmi lesquels je ne citerai qu’un seul nom mais qui fait l’unanimité : Cheikh Anta Diop. Nous devons approfondir les pistes tracées par ces derniers et les médiatiser, en sachant que les média, purs ou complexes, peuvent être des armes de destruction massive pour ceux qui les subissent inconsciemment ou passivement. Et parce que le rôle fondamental des média est de fabriquer des images et de les projeter pour investir et coloniser le réel, nous devons décrypter la vision afropessimiste que nous avons héritée de quelques siècles de soumission presque complète au diktat de l’Occident. Contrairement à ce que veut nous imposer une certaine médiatisation à propos de l’Afrique, nous autres Africains avons de véritables raisons d’être afro-optimistes aujourd’hui : ce livre vous en propose quelques-unes, qui naturellement sont soumises au débat…
Modeste Mba Talla : Vous revenez constamment sur les thèmes tels : le spiritualisme, matérialisme et religion. Quel lien faites-vous avec celui du développement? En somme existe-t-il des paramètres ou fondement strictement spirituels (culturels) lorsqu’il s’agit de penser le développement?
Roger Kaffo Fokou : La question spirituelle m’a frappé d’abord parce que Cheikh Anta Diop a cru devoir l’évacuer d’emblée ou tout au moins en différer le traitement. Ce faisant, il ramenait la question matérielle au premier plan, comme Cheikh Hamidou Kane dans L’Aventure ambiguë : « Apprendre à vaincre sans avoir raison ». Vous voyez, l’Afrique est devenue matérialiste par mimétisme. L’on se souvient du mot du Zarathoustra de Nietzsche : « Dieu est mort! ». Décréter la mort de Dieu est bien dans la ligne de la civilisation occidentale prométhéenne où dès les origines les dieux sont en conflit avec les hommes. Cela n’a jamais été ainsi en Afrique et il suffit de revenir à l’Égypte ancienne pour s’en convaincre. La séparation entre spiritualité et religion ne peut avoir un sens que dans un univers où l’on a séparé le ciel de la terre, où l’homme s’est coupé des dieux, où le principe de laïcité s’est imposé. Et quand vous coupez l’esprit de sa source première, comment voulez-vous qu’il survive? C’est la raison pour laquelle l’Occident a développé l’une des civilisations les plus matérialistes de l’histoire. Vous savez que la matière ne vit (ne prend forme) que lorsqu’elle est habitée par l’esprit sinon elle n’est que chaos. Je pense que développer c’est, en un sens, accomplir. L’esprit premier a crée l’homme puis la nature, et Il a confié à l’homme la tâche d’accomplir donc de développer la création, c’est-à-dire de faire comme lui en investissant le réel de son esprit pour lui donner une forme. Ce n’est pas pour rien que dans le mot « culture » il y a « culte ». La culture est une mise en forme du réel au moyen de l’esprit qui n’est autre qu’une parcelle du grand Esprit. Dès lors que l’esprit déserte nos œuvres et que nous nous mettons à agir pour des buts purement matériels, nous commençons à fabriquer le chaos, c’est-à-dire le « vide d’être ». Et, peu importe la dimension de nos réalisations, elles ne seront pas durables. Le concept de développement durable devrait également s’entendre de cette façon-là.
Vous revenez sur l’indispensable rôle des intellectuels dans le processus de développement. Parlant du Cameroun n’est ce pas une «race» en voie de disparition?
Roger Kaffo Fokou : Mon Dieu! C’est tragique de le dire. Vous me faites penser à Mongo Beti et à Jean-Marc Ela. Heureusement que Fabien Eboussi Boulaga vit encore. J’ai participé il y a de cela quelques années à une table ronde avec feu Sévérin Cécile Abega. Vous savez, c’était un intellectuel authentique. Il définissait l’intellectuel d’une manière fort originale comme celui qui ne mange pas des deux joues à la fois. C’est l’une des plus belles définitions de ce mot qu’il m’ait été donné d’entendre. Vous voyez ces messieurs cousues de diplômes qui dans notre pays puisent dans les caisses de l’État gloutonnement, et s’empiffrent des deux joues à la fois tandis que le peuple crève dans la misère! Notre pays traverse une longue éclipse. Nous n’avons presque plus de modèle et tous ceux qui parlent à la jeunesse ont pour la plupart embrassé le veau d’or à un moment ou à un autre. L’on oublie trop souvent chez nous que la France moderne prend forme avec les intellectuels comme La Fontaine, Racine, Corneille et autres au XVIIè siècle, et que le Gavroche de Hugo ne se trompe pas lorsqu’il impute la responsabilité de la révolution à Voltaire et à Rousseau. Mais notre peuple a du génie et je ne crois pas que cette éclipse soit durable. Il y a des voix jeunes qui parlent déjà assez fort comme celle d’Achille Mbembe pour n’en citer qu’une.
Modeste Mba Talla : De nombreux jeunes africains accusent leurs élites ou intellectuels d’avoir abandonné la société africaine pour se complaire dans un « griotisme » et un « ventriotisme » insensé. Ce griotisme, s’est une fois de plus revelé en 2004, lorsque près 400 enseignants des universités camerounaises ont tous signé pour la réélection de M. BIYA. N’est ce pas ce manque d’éthique qui explique les nombreux blocages dans la société camerounaise malgré les nombreuses initiatives qui s’y développent ? Les populations n’ont-elle pas raison de blâmer l’intelligentsia de complicité de médiocratie au Cameroun ?
Roger Kaffo Fokou : Notre « élite » souffre d’un mot qui a un nom : matérialisme. Au Cameroun, il faut avoir le maximum de diplômes pour gagner le plus gros possible. Naturellement nous savons de qui cette « élite » tient : elle est formée à l’école néocoloniale et constamment recyclée dans les laboratoires de l’Occident. Je connais personnellement nombre d’enseignants d’université pour qui j’ai le plus grand respect mais nombreux sont ceux dont la sélection est questionnable. Vous savez, pour la plupart d’entre eux, les plus grands projets consistent à se bâtir une résidence confortable, s’acheter une grosse cylindrée et multiplier les conquêtes du beau sexe. Ils sont toujours sur un projet de recherche qui leur ouvre la voie pour un stage de temps à autre en métropole, dans les laboratoires des autres mais qu’en sort-il au fil des ans pour leur pays? Le bilan des 50 dernières années est bien maigre, il faut l’avouer. L’IRAD qui produisait des résultats est aujourd’hui sinistré et la recherche n’est plus en réalité qu’un inconfortable garage. Pourtant les plus importantes revendications de nos universitaires ces dernières années, alors que l’université est devenue un cimetière à étudiants, n’ont pas quitté la sphère alimentaire. Cela arrange bien les affaires de l’Etat parce qu’arrondir les fins de mois de 2000 enseignants, cela coûte de loin moins cher que de mettre en place des universités viables. Dans le récent classement des 100 premières universités d’Afrique ne figure aucune université camerounaise et cela n’étonne nullement. Quand les filières de recrutement y compris celles des enseignants d’université passent par des parrainages de caciques du parti, peut-on être étonné que l’université « pétitionne » pour demander au prince en poste de prolonger son bail? L’on n’est pas non plus étonné quand un enseignant d’économie enseigne à ses étudiants non pas les théories d’Adam Smith ou de Ricardo mais l’idéologie du RDPC, ou qu’un agrégé d’économie réunisse un aréopage d’opérateurs économiques pour les assurer que la crise financière ne toucherait pas leurs affaires au moment où ces dernières en pâtissent déjà. Comme vous pouvez le constater, nombre de nos grands diplômés ont une mentalité de charlatan et il n’est pas surprenant que le peuple ne leur fasse plus confiance.
Modeste Mba Talla : Dans un pays normal quel rôle cette élite camerounaise devrait normalement jouer dans le processus de démocratisation et de développement au Cameroun ?
Roger Kaffo Fokou : La démocratie comme mode de gouvernement est un héritage grec. C’est Solon qui donne à la Grèce sa première constitution démocratique au IVè siècle avant Jésus-Christ. La démocratisation chez nous n’est pas un processus endogène dans ses motivations profondes et ses objectifs. C’est un héritage hypocrite du discours naguère fameux de la Baule. C’est un alibi de légitimation d’une gouvernance qui fonctionne à contre-courant des aspirations populaires. Pour l’instant, ce n’est guère plus qu’un vernis dont on recouvre pour les dissimuler les facettes hideuses d’un gangstérisme politique dont le contrôle semble de plus en plus échapper à ses propres géniteurs. Une franche dictature rendrait plus de services à une nation que le simulacre de démocratie qui pourrit le Cameroun depuis des années et qui nous a subrepticement poussés sur la pente de la régression sociopolitique et économique. Quel intellectuel véritable pourrait se rendre complice d’une pareille forfaiture? A Haïti, nous avons vu Jean-Jacques Stephen Alexis se battre et mourir pour un peuple qui souffre encore aujourd’hui mais qui a acquis le réflexe du combat. C’est cela, il me semble, que l’on attend de l’élite, qu’elle éveille et aide à développer puis enraciner le sentiment patriotique, le désir de vivre ensemble, de réussir ensemble, de protéger les faibles, de bâtir un véritable Etat. Au lieu de quoi notre élite est rentrée dans une espèce de maquignonnage honteux : « You scratch my back I scratch your own », disait un ancien premier ministre! Où est le sens du sacrifice? De l’intérêt général? De l’altruisme? Que fait-on de la solidarité nationale? Notre élite s’est engluée dans les marais d’un communautarisme morbide qui détruit l’embryon d’Etat que le temps essaie de bâtir pour nous. Il n’y a pas un meilleur moyen de travailler pour le sous-développement.
Modeste Mba Talla : Vous faites référence à un exemple de mythe moderne et de son efficacité: le mythe des « Lions indomptables » au Cameroun ce mythe peut-il survivre à la gestion presque préhistorique par les autorités camerounaises du sport au Cameroun?
Roger Kaffo Fokou : Ce sous-titre ne rend pas fidèlement compte du contenu de cette partie du livre. En fait, comme mythe moderne, les « Lions indomptables » sont un échec indiscutable. C’est là le danger des mythes vivants : ils peuvent à tout moment se désacraliser et perdre cette énergie qui leur permet d’être des moteurs de l’action individuelle ou collective. Un mythe, vous savez, c’est un discours religieux plus ou moins désactivé mais qui continue à opérer parce qu’il conserve dans la conscience ou l’inconscient des hommes ce je ne sais quoi de sacré qui en fait une voie à suivre, un appel permanent à un dépassement de soi vers un idéal communément accepté. Et que représentent aujourd’hui aux yeux des Camerounais « Les lions indomptables » si ce n’est l’inconstance, la débrouillardise, l’impréparation, l’improvisation et tous les défauts du même genre? En fait, cette équipe est devenue le symbole d’une société de jeux dominée par le pari mutuel urbain où l’on a convaincu le citoyen qu’il est possible de faire des gains mirifiques en misant des bricoles. Il suffit de regarder l’état de nos infrastructures sportives depuis des décennies que les lions gagnent pour comprendre. Nous en sommes réduits ces derniers temps à faire recours aux Chinois, contre qui nous concourons dans les compétitions internationales!
Modeste Mba Talla : En quelques mots quels sont les pistes pour demain au regard de cette nouvelle philosophie du travail pour l’Afrique que vous préconisez au regard de votre ouvrage. Est-ce une manière de combattre l’afropessimisme ambiant que vous pourfendez?
Roger Kaffo Fokou : L’afropessimisme comme discours est un média, un prolongement tantôt de l’esprit de l’autre pour nous formater et nous figer dans une mentalité de perdants – le looser comme dirait l’anglo-saxon – et subséquemment de dépendants, tantôt de notre esprit qui a fini par s’approprier cette image exogène pour se la reprojeter. C’est dans cette seconde perspective que l’afropessimisme est le plus destructeur. Nous devons le combattre vigoureusement. Il faut se méfier des images quelles qu’elles soient : elles ont un pouvoir narcotique que l’on contrôle difficilement parce qu’elles s’adressent à une zone du cerveau qui échappe au contrôle de rationalité, l’hémisphère droit du cerveau. Les images tendent à nous figer dans une attitude contemplative qui est mortelle à toute ambition de progrès. C’est pour cela que l’afro-optimisme, plus qu’une contre-image, doit être une philosophie de l’action, du travail. La philosophie du travail que nous avons reçue de l’occident, et que l’on retrouve déjà dans les mythologies grecque, nordique et moyen-orientale considère le travail comme une corvée réservée aux hommes par des dieux qui veulent disposer de tout leur temps pour les loisirs et la jouissance, ou comme une sanction comme c’est le cas dans la tradition juive. L’on comprend pourquoi, s’étant élevés au rang des dieux dans ces sociétés, les hommes ne pouvaient avoir que du mépris pour le travail, et donc avait un besoin vital de possession d’esclaves. Dans l’Égypte antique, le travail n’a jamais été revêtu de valeurs négatives. Au contraire, il entre dans le dessein des dieux comme moyen d’élever les niveaux de vie individuel, d’égaliser les statuts sociaux. C’est dans ce sens que Marx considérait le travail désaliéné comme un moyen pour l’homme de s’accomplir c’est-à-dire d’aller vers un degré supérieur d’humanité donc de spiritualité. Nous devons revaloriser le travail si nous voulons enclencher un véritable processus de développement en Afrique.
Modeste Mba Talla : Dans le livre collectif que vous dirigez «Misères de l’éducation en Afrique: Le cas du Cameroun aujourd’hui» vous passez aux cribles avec vos collègues la situation de l’éducation au Cameroun. Par-delà certaines statistiques officielles qui ont permis de dire que « des progrès ont été accomplis ces dix dernières années », la réalité sur le terrain est souvent bouleversante, comme l’on peut le constater en s’appuyant ici sur le cas concret du Cameroun : absence d’objectifs propres et d’ambition de la part des États, rétrécissement constant de l’accès à l’éducation, précarisation du statut des enseignants, dégradation continue de la qualité de l’éducation, etc. En tant qu’enseignant, quel commentaire vous suggère la situation qui prévaut dans les lycées et collèges du Cameroun en ce moment ? Quels sont les principaux obstacles auxquels vous êtes confronté au quotidien dans vos tâches comme enseignant ?
Roger Kaffo Fokou : Comme enseignant de terrain et depuis des années, je suis confronté à une situation tragique : celle de quelqu’un qui sert tout juste d’alibi à l’État et dont au fond personne ne semble véritablement avoir besoin. C’est cela que je décriais déjà dans Les Générations sacrifiées au début des années 90. C’est encore plus vrai aujourd’hui. De plus en plus de collèges et lycées au Cameroun sont de plus en plus des établissements fantômes : infrastructures insuffisantes, délabrées et non entretenues, sans équipements – pas d’infirmerie, pas de cantine, d’infrastructures sportives, pas de bibliothèques, de laboratoire etc. – sans enseignants. Le moindre lycée de Yaoundé ou de Douala fonctionne avec 20 à 25% d’enseignants que l’Association des parents d’élèves paie entre 30 et 50.000 FCFA le mois. Je vous laisse deviner le niveau des prestations fournies! Le primaire est entré depuis bientôt 10 ans dans un cycle de précarisation absolue : dans quelques années, il n’y aura plus de fonctionnaires dans ce niveau-là. Au secondaire, segment que le pouvoir d’achat a laissé en cours de route depuis les années 90, on commence sa carrière dans la débrouillardise et la termine dans la misère et la détresse. L’État dominé par le pouvoir destructeur des administrateurs civils a développé une philosophie selon laquelle les corps sociaux à grands effectifs doivent être condamnés à la misère à moins qu’ils ne disposent de fusils et autres machines de guerre. Il est évident que dans un tel contexte les rendements des enseignants ne peuvent que baisser, surtout que parallèlement l’ENS est devenue une grande surface où l’on vend des postes d’enseignant au plus offrant. Alors, pour donner le change, l’on fabrique de toutes pièces, comme le démontre le texte de Basile Fosso Dongmo, les résultats aux examens officiels. Ce qui manque cependant à notre école dans tous ses compartiments, c’est une perspective : à qui et à quoi sert-elle? L’on ne s’est jamais vraiment soucié de répondre à cette question.
Modeste Mba Talla : Les enseignants « craie en main », c’est-à-dire les professeurs qui enseignent effectivement se plaignent du traitement que leur infligent leurs collègues appelés à occuper une fonction dans l’administration. Comment s’explique un tel clivage dans un même corps ?
Roger Kaffo Fokou : Je vais surprendre plus d’un en défendant cette administration scolaire : elle est faite de victimes, consentantes ou non, d’un système foncièrement pervers. Vous savez, c’est une chaîne d’esclaves qui gèrent des ordres plus que des structures. Les chefs d’établissements vivent un stress permanent qui est intolérable et leur cœur bondit chaque fois qu’un véhicule s’arrête en face de leur bureau, que leur téléphone sonne : n’est-ce pas le Ministre? Ou son envoyé? Le délégué régional ou départemental? Le préfet ou le sous-préfet? Et chacun de ces messieurs et dames a quelque chose à lui prendre, à lui reprocher. On lui vend tout : les infrastructures, les équipements, le personnel, son maintien en poste, toutes choses que l’État offre gracieusement pourtant. Et l’on attend de lui des résultats qu’il est censé produire par tous moyens, sinon les enchères augmentent. Mon Dieu! Comment voulez-vous dans ces conditions que l’on soit un chef d’établissement épanoui? Beaucoup d’entre eux sont des tyrans non par vocation mais par déformation. Bien sûr ils s’agrippent à ces strapontins dérisoires que sont aujourd’hui les provisorats et les directorats pour échapper à la misère dans laquelle ils voient leurs collègues craie en main mais à quel prix?
Modeste Mba Talla : L’état de délabrement des Lycées camerounais est inquiétant : bâtiments sales, toitures pas toujours étanches, si elles existent, les bibliothèques vides ou dépassées. Que prévoient les budgets des Lycées pour qu’au fil des ans, rien ne soit fait pour améliorer le cadre de travail des élèves et des enseignants ? La question est d’autant plus pertinente que l’on retrouve dans certains Lycées des vestiges de bibliothèques, de salles de musique qui témoignent d’une gloire passée. Qu’est-ce qui a changé ?
Roger Kaffo Fokou : Ce qui a changé, c’est le budget de l’État et la manière de l’exécuter. 80% dans le fonctionnement, 20% dans l’investissement. Toutes les commodités que vous énumérez sont aujourd’hui à la charge du parent qui est, comme l’on sait, non pas pauvre mais appauvri. C’est cela l’école du sous-développement. Les 20% du budget réservé à l’investissement sont gérés selon la procédure des marchés publics : déduction d’impôts (TVA et autres), fractionnement et vente aux enchères aux responsables des structures, pourcentages divers abandonnés aux divers représentants du maître d’ouvrage (Préfet, président de la commission des marchés publics, ingénieur des travaux, contrôleur financier local, chef de structure…), au bout du compte il ne reste rien pour réaliser l’ouvrage. Le financement de l’investissement public est devenu la plus grande source de détournement presque légalement garanti par la mercuriale des fonds publics, une sinécure qui alimente les comptes d’une chaîne de bureaucrates et de politiciens qui court de la base au sommet de l’Etat. Autrefois, c’était différent. Voilà ce qui a changé.
Modeste Mba Talla : Le débat sur la baisse du niveau des élèves est lancinant. A votre avis, est-ce un problème réel ou un aspect du conflit des générations qui veut que les aînés trouvent toujours à redire sur la constitution et la performance de leurs cadets ? Et si cette baisse de niveau était effective, qu’est-ce qui l’explique dans le contexte Camerounais ? Que proposeriez- vous pour y remédier ?
Roger Kaffo Fokou : Il y a là certainement une part du conflit permanent des générations mais celle-ci est minime. Les enfants sont plus éveillés aujourd’hui mais l’école que la société leur propose n’est plus à la hauteur. Il nous faut ici reparler de la notion de perspective : la performance d’un système dépend étroitement de ses débouchés. Une entreprise qui ne vend pas ne peut continuer à produire ou alors si elle le fait, ce sera au détriment de la qualité. Vers quoi mène notre école? Vers le chômage ou l’exil. Les maigres places disponibles sur le marché local de l’emploi s’arrachent aux enchères. Vous pensez qu’il s’agit là d’une situation propre à susciter et entretenir le goût des études? Le sentiment de l’inutilité de l’effort scolaire est depuis longtemps le lot commun des générations successives d’élèves et étudiants camerounais. Il n’y a donc aucune surprise à ce que leur niveau se dégrade. La démotivation des enseignants, tout en accentuant ce phénomène, s’en nourrit en même temps. Il faut revoir tout cela. L’État doit savoir qu’il lui incombe de donner un emploi à chaque citoyen. L’Article 2 de la loi N°92/007 du 14 août 1992 portant code du travail dispose clairement que « Le droit au travail est reconnu à chaque citoyen comme un droit fondamental. L’État doit tout mettre en œuvre pour l’aider à trouver un emploi et à le conserver lorsqu’il l’a obtenu » Si cet engagement de l’Etat est respecté, cela contribuera à redonner un sens à l’école, aux efforts que les uns et les autres y déploient, à la nécessité d’y investir des moyens pour en accroître l’efficacité.
Modeste Mba Talla : La conférence mondiale sur l’éducation tenue à Jomtien en Thaïlande en 1990 reconnaissait déjà le rôle décisif de l’éducation dans l’autonomisation des individus et la transformation des sociétés. L’EPT (Éducation Pour Tous) est alors devenue un des objectifs du millénaire pour le développement. 18 ans après Jomtien et 8 ans après les engagements pris par les États à Dakar, le bilan reste largement contrasté, surtout en Afrique subsaharienne. Pourquoi? Par rapport à ce qui se passe dans d’autres pays et par rapport aux défis que les mutations globales imposent à la jeunesse, comment jugez-vous le système éducatif camerounais ?
Roger Kaffo Fokou : A mon avis, l’Afrique subsaharienne manque de politiciens visionnaires. La plupart de nos États sont entre les mains de cliques qui n’ont pas de projet de société. Un projet comme l’on sait commence par une vision et celle-ci fait défaut chez nous. S’agit-il de simple court-termisme? Difficile de l’affirmer. Le développement des ethnismes qui est si nuisible aux constructions d’entités étatiques viables vient de l’incapacité à prendre la mesure des brassages en cours dans la société réelle et de les projeter dans l’avenir. Prenons la chose par un autre bout : nos sociétés stagnent et régressent faute de tension vers le progrès. A qui cela profite-t-il? A un ordre mondial dont nous sommes la périphérie et nos dirigeants des chiens de garde. La fonction publique représente près de 4% de la population des pays industrialisés. Chez nous, elle représente moins de 1% et les institutions de Bretton Woods estiment qu’elle est pléthorique, alors que les établissements scolaires manquent d’enseignants et les formations sanitaires de personnel sur toute l’étendue du pays. Il s’agit là d’un véritable sabotage. En France, la part du PIB c’est-à-dire de la richesse nationale consacrée à l’éducation est de près de 7%. Au Cameroun, il est inférieur à 3%. Pourtant de plus en plus, notre jeunesse doit affronter sur le marché mondialisé du travail les jeunes Français. Quel sera l’issue de la bataille? Chacun peut répondre à cette question. Les enjeux du futur sont là et chacun le sait.
Modeste Mba Talla : Et pourtant seule une éducation de qualité accessible à tous permettra de lutter efficacement contre la pauvreté en Afrique comme cela se fait ailleurs. Pourquoi au Cameroun on n’arrive pas encore à admettre que ce qui est fait actuellement par les autorités est suicidaire et doit être revu profondément, courageusement? Et comment parvenir à une véritable école de développement au Cameroun?
Roger Kaffo Fokou : Parce que les forces conservatrices l’emportent encore sur les forces du progrès. Par manque de courage individuel et collectif. Les syndicats dans le secteur de l’éducation ont globalement échoué au cours des années 90 et cela a laissé une empreinte profonde. L’État ou ce qui en tient lieu s’est trouvé conforté dans sa volonté d’immobilisme. Le Cameroun est géré par des gérontocrates assistés de leurs familles et de leurs valets. Ce n’est pas là un cercle où circulent des idées nouvelles. Ceux qui attendent du changement venant de cette direction sont tout simplement pathétiques. Mais la pression populaire monte, surtout du côté des jeunes qui sont presque tous le dos au mur. Et le cercle du pouvoir, acculé à maintenir un statu quo favorable aux intérêts de l’ordre qui le maintient et le protège se retrouve pris entre deux feux. Combien de temps cela va-t-il durer? Il faudrait une boule de cristal. Le changement cependant ne saurait consister à remplacer cette clique par une autre. Pour être véritable, il doit être planifié et mis en place progressivement, méthodiquement, à travers une véritable école de développement. Comment y parvenir? La réponse n’est pas aisée ni unique. La société doit prendre ses responsabilités à tous les niveaux. Je pense que les syndicats ont là un rôle historique à jouer. Pour cela, ils doivent sortir du corporatisme étroit qui est finalement devenu un ghetto dans lequel ils ont enfermé leur avenir. C’est là le nouveau sens d’une mission historique qu’ils doivent se donner. Oui, le syndicalisme de développement peut aider à mettre en place au Cameroun comme ailleurs en Afrique une école de développement.
Modeste Mba Talla : Enseignant du secondaire, scandalisé par les conditions des enseignants et des élèves, votre découverte de ce monde à la dérive vous a poussé à vous lancer dans le syndicalisme. Vous dirigez depuis 4 ans le Syndicat National Autonome de l’Enseignement Secondaire (SNAES). Comment se porte le SNAES et quels sont les problèmes auxquels vous êtes confronté?
Roger Kaffo Fokou : 5 ans déjà, le temps passe vite. Je suis désolé de le dire mais je le dois à la vérité : le SNAES ne va pas bien. De 1994 à 2004, il a été emporté par pans entiers, au gré des aléas du combat en 1994, des déchirements de ses leaders en 1996, 1998 et 2004. Le SNAES ressemble de plus en plus aujourd’hui au temple de Salomon : ce qu’il en reste n’est plus qu’un mur des lamentations. Mais il peut se reconstruire en trois jours. Seule la foi manque pour l’instant mais ce n’est pas une situation permanente. Vous savez, l’on ne se sacrifie durablement que pour une chose dont on vit. Les syndicats d’enseignants au Cameroun sont acculés à l’indigence et vivent, très mal, de bénévolat. Comment fonctionner sans budget et comment obtenir son budget de personnes qui tirent le diable par la queue? C’est un pari surhumain qui demande un sacrifice surhumain. La coopération syndicale internationale est nulle ou presque. Elle ressemble à l’autre coopération, celle derrière laquelle se cache le néo-colonialisme avec ses alibis pour s’alléger la conscience. On se plaint de ce que les syndicats n’obtiennent pas de résultat : comment exécuter efficacement un projet dont le volet ressources est absent? Il faut arriver à changer cela, en contournant ceux qui ont intérêt, pour conserver ou améliorer les marges de plus-value tirées de l’exploitation des travailleurs, à maintenir le statu quo par tous les moyens. Dans ce sens-là, toutes les contributions, de quelque nature que ce soit, sont les bienvenues.
Modeste Mba Talla : Pourquoi le musellement des syndicats au Cameroun ? Quelles en sont les conséquences ? Y a-t-il des risques de conséquence à ce musellement?
Roger Kaffo Fokou : Le musellement des syndicats au Cameroun participe d’une stratégie mise en place depuis l’époque coloniale. Cette stratégie est solidaire d’un ordre sociopolitique où le travailleur est évacué parce qu’étant un sujet infrahumain, presque un objet. Déjà dans l’Europe médiévale ce sont les serfs qui constituent la main d’œuvre et comme l’on sait, ils se distinguent de ceux que l’on appelait « gens de condition » qui seuls avaient un nom. Cette exclusion de la nomination est en fait une néantisation au sens où, comme disait Sartre, nommer c’est amener à l’existence. L’Europe capitaliste libère le travailleur des liens du servage mais en fait un simple rouage de la grande industrie, un outil. A la suite des critiques de Marx et de la mise en place des syndicats, le travailleur outil jusque-là silencieux va acquérir une voix, s’humaniser et commencer à compter dans la société. C’est d’ailleurs en s’appuyant sur les syndicats que les premiers partis de gauche accèdent au pouvoir en Europe. Et accédant au pouvoir, ces partis ouvriers vont mettre en place toute une législation sociale dont l’Europe est encore fière aujourd’hui, mais en rognant toujours un peu plus sur la part des capitalistes. Comme on peut le voir, par expérience, l’ordre marchand sait que les syndicats sont plus dangereux pour ses intérêts que les partis politiques. Dans un système mis en place et contrôlé par les grandes firmes internationales, il est normal que le travailleur apparaisse comme un danger. C’est pourquoi le terme « peuple », plus politique, est préféré à « travailleur » qui est plus syndical. L’on peut comprendre pourquoi au Cameroun les syndicats sont ligotés. La loi n°90/053 sur la liberté d’association prévoyait en son article 5 al 4 que « Les partis politiques et les syndicats sont régis par des textes particuliers ». Le texte régissant les syndicats du secteur privé fut mis en place en 1992 et l’on sait qu’il précarise la situation du travailleur complètement livré à l’employeur pour la fixation de sa rémunération et son licenciement. La loi sur les partis politique n’avait pas non plus tardé à être mise en place; celle sur les syndicats du secteur public est toujours attendue 19 ans plus tard. Le résultat est là : la situation des travailleurs n’a cessé de se dégrader et la pauvreté s’est installée. Les plus-values que l’on a permis à un secteur économique extraverti de cumuler sur le dos des travailleurs n’ont pas été investies dans l’économie camerounaise. N’ayant pas d’interlocuteurs sérieux, les hommes au pouvoir se sont laissés aller à une gestion sans rigueur qui est devenue calamiteuse avec le temps. Pour changer le Cameroun, il faut des syndicats forts. Notre syndicalisme pour l’instant est trop divisé et nos travailleurs peu et mal formés, difficiles à mobiliser. Mais il faut dire qu’en situation d’explosion sociale, le pouvoir aura la mauvaise surprise de ne trouver aucun interlocuteur avec qui discuter et à ce moment-là, des feux seront en train d’être allumés par toute la cité. L’exemple de février 2008 est encore frais dans les mémoires.
Modeste Mba Talla : Où en est-on avec le statut particulier des enseignants au Cameroun?
Roger Kaffo Fokou : Bientôt 10 ans et il n’est pas toujours appliqué dans son intégralité. C’est un texte qui date de 2000. Outre qu’il octroie des primes ridicules aux enseignants, ce texte est plus qu’une insulte aux enseignants, c’est une insulte à la république. Il montre que l’on n’est pas dans un État de droit et qu’un texte réglementaire revêtu du sceau de la plus haute autorité de l’État peut n’avoir pas plus d’importance qu’un simple torchon de papier. De toute façon, cette stratégie des statuts particuliers est un procédé pour bantoustaniser la fonction publique. Et elle fonctionne d’ailleurs à merveille pour l’instant, si bien qu’au lieu de voir ce qui les unit, les salaires dérisoires, les travailleurs voient surtout ce qui les sépare, des primettes et des avantages ridicules. La véritable bataille pour les fonctionnaires se situe au niveau de la valeur du point d’indice qu’il faut uniformiser. Comment peut-on justifier qu’au-delà de l’indice 300 le titulaire d’une fonction de l’État voie la rémunération de ses prestations dévaluée de plus de 50%? C’est cela qui a sinistré le corps des enseignants du secondaire dont près de ¾ des indices se situent dans cette zone rouge. Donc, ne parlons plus de ce statut ingrat. De toutes les façons, ce qu’il était supposé donner est en retard de 10 ans, donc complètement dévalué, désormais inadapté.
Modeste Mba Talla : Est-ce possible de donner un avenir au Cameroun par un syndicalisme de développement ? Comment cela peut-il se faire?
Roger Kaffo Fokou : Le syndicalisme de développement est un concept que nous avons fait adopter au SNAES au congrès de 2007. Sans chercher à le comprendre, beaucoup d’adeptes du syndicalisme anarchique l’ont plutôt raillé. Peu à peu ils reviennent à la raison et il apparaît de plus en plus à beaucoup comme le concept du syndicalisme du futur. En effet, le syndicalisme ne saurait se développer dans l’ignorance complète de son contexte. Il faut savoir que le syndicalisme occidental émerge au milieu du XIXè siècle (1825 en Grande-Bretagne, 1864 en France) dans un contexte où la révolution industrielle a résolu le problème de la production et créé d’immenses richesses mal redistribuées. Il était donc normal que le programme de ce syndicalisme-là fût articulé autour des améliorations sociales et des avantages divers à arracher. Notre syndicalisme naît dans un contexte de sous-production où la valeur travail et son corollaire, le mérite, sont dégradés par des politiques et une éducation inappropriées. Notre syndicalisme doit en tenir compte et devenir un instrument de revendication des conditions d’efficacité du travail en même temps qu’une école de rigueur et de quête de l’excellence. Or l’excellence ne peut s’évaluer qu’à partir des objectifs préfixés et l’objectif chez nous c’est le développement. Si les autorités qui incarnent l’État chez nous ne sont pas prêtes à mettre en place une école de développement, les syndicats d’enseignants, de par leur position privilégiée peuvent former les enseignants à donner à leurs enseignements une dimension stratégique orientée vers le développement. Tous les peuples qui s’en sont sortis n’ont fait que cela, et devant les incertitudes du futur, Nicolas Sarkozy est en train de réformer l’éducation en France dans cette perspective-là, dans le cadre de ce qu’il a appelé une politique de civilisation.
Modeste Mba Talla : En tant qu’en encadreur au quotidien de la jeunesse, comment entrevoyez-vous l’avenir de la jeunesse camerounaise ? Les jeunes camerounais semblent désespérés. Quels conseils leur donneriez-vous ? Rester sur place ou s’exiler à leurs risques et périls ?
Roger Kaffo Fokou : Je vis leur désespoir au quotidien. En 2007 j’avais saisi les autorités publiques camerounaises et les représentations diplomatiques étrangères à Yaoundé d’une lettre dans laquelle je mettais en garde contre une éventuelle explosion de la jeunesse due aux frustrations et au désespoir. Personne ne m’avait alors pris au sérieux. Même l’ambassade de France qui m’avait invité et m’avait écouté avait apparemment trouvé que je faisais de l’alarmisme. Ce n’est un plaisir pour personne de jouer tout le temps les Cassandre. L’on sait ce qui est arrivé en février 2008 et la férocité de la répression qui s’en est suivie. Vous savez, en février 2008, la police camerounaise a fait pire que son homologue sud-africaine en 1976 à Soweto, et le monde s’est tu. Évidemment le Cameroun n’est pas la Chine et le pont sur le Wouri n’est pas la place Tianamen; les enjeux stratégiques ne sont pas les mêmes. N’empêche que cela recommencera parce que rien de sérieux n’est en train d’être fait pour alléger la détresse de la jeunesse. Les réseaux maffieux et sectaires dans lesquels l’on coopte quelques-uns sont marginaux et ne constituent pas une politique de prise en main de la jeunesse. Alors, celle-ci est tombée dans toutes les stratégies du désespoir. L’une d’elle consiste à partir à tout prix. J’en ai rencontré beaucoup à l’étranger complètement en rade et qui regrettent le Cameroun mais sans possibilité de marche arrière. Que faut-il leur conseiller? A mon sens, que l’on ne peut pas tous partir. Nombreux sont physiquement au pays mais leur esprit est parti depuis longtemps. Il faut se battre sur place pour changer le système. Pas forcément en cassant et en brûlant même s’il est vrai que les jeunes de février 2008 ne descendaient pas dans les rues pour casser et brûler : ils voulaient tout juste donner de la voix et chemin faisant ils se sont aperçus qu’il fallait mettre le volume au maximum pour se faire entendre. Partir n’est donc pas la solution surtout quand c’est partir à tout prix. Nos jeunes ne devraient aller à l’étranger que comme l’on va en mission : aller apprendre à « vaincre sans avoir raison »; comme Jason, il doit s’agir d’aller à la conquête de la toison d’or.
Modeste Mba Talla : Dans un Cameroun de demain comment réparer les impairs et injustices qui ont été commis, comment réconcilier la masse des exclus dont nous faisons partie d’avec les bourreaux qui ont joui des biens appartenant à tout le pays pendant plus d’un quart de siècle? Comment penser l’avenir, comment penser demain?
Roger Kaffo Fokou : Pour ma part, je ne vois qu’une seule voie : il faut se mettre ensemble et débattre puis décider consensuellement. Nous n’avons jusqu’ici vécu que sous le régime du diktat. C’est un régime qui engendre la peur de tous côtés. Dès 1956, la gauche libérale camerounaise demandait déjà que les Camerounais de tous les bords politiques se mettent ensemble pour arrêter un programme minimum de construction nationale. En 1957, Um Nyobé avait adressé au premier ministre et au haut-commissaire des « propositions pour une détente morale et politique au Cameroun ». L’intransigeance de Mbida alors premier ministre barra la route à ces propositions. En 1958, la gauche libérale relança le projet en parlant de table ronde de tous les partis pour une véritable réconciliation nationale : Ahidjo rejeta avec sarcasme l’idée, y compris celle d’une constitution consensuelle en 1960. Mais il y avait un réel besoin d’un dialogue national et en 1990, sa revendication prit le mot d’ordre de « conférence nationale souveraine » et embrasa les rues. Il me semble qu’il faudra organiser ces assises que les Camerounais de tous bords revendiquent depuis l’époque coloniale pour chasser les démons de la division et commencer vraiment à construire notre pays.
Modeste Mba Talla : Vous êtes un observateur attentif de la scène politique camerounaise. Pensez-vous comme le politologue Manassé Aboya Endong que « Le chemin qui nous conduit en 2011 va être particulièrement heurté » Si oui est-il possible d’éviter les écueils du moins à les rendre moins dangereux?
Roger Kaffo Fokou : Nous sommes dans un État déliquescent qui est même de plus en plus un État virtuel. C’est de plus en plus un patchwork dont les différentes composantes s’affrontent dans des duels fratricides. Bien malin qui peut dire aujourd’hui où se situent au Cameroun les centres de pouvoir. C’est une situation d’incertitude extrême qui rappelle le Moyen Âge occidental avec des rois impuissants guerroyant contre des barons pilleurs. Dans ce genre d’atmosphère, la première victime est généralement l’État dans tous les sens du terme. La crise économique et la récession qui s’installent sont un ingrédient de trop dans ce cocktail déjà explosif. Si la famine jette les foules dans la rue à un moment ou à un autre, le pays peut basculer dans l’horreur. Si les « grands équilibres politiques » traditionnels sont mis à mal, le pays peut basculer dans l’horreur. Le Cameroun est rentré dans une véritable situation de funambule dont l’issue est des plus incertaines. Il n’est pas sûr que les égoïsmes et l’entêtement des uns et des autres permette de négocier heureusement le virage.
Modeste Mba Talla : Quel est vôtre rêve pour le Cameroun ?
Roger Kaffo Fokou : Je vois un Cameroun multiethnique et uni, décomplexé et travaillant pour son avenir. Dans un siècle, il sera de plus en plus difficile de tracer les frontières ethniques au Cameroun et nos petites batailles d’aujourd’hui paraîtront déjà bien ridicules aux yeux de nos petits-enfants. Déjà nombre de villages sont absorbés par la ville. Il n’est pas normal qu’aujourd’hui encore les zones sous-scolarisées des années 60 le soient restées. Le statut de bénéficiaire de la discrimination positive n’est pas plus enviable que celui de pays pauvre très endetté. Il faut désenclaver l’ensemble du Cameroun, décomplexer ses populations, leur offrir un véritable programme de développement et les aider à l’appliquer. Je rêve de voir le Cameroun sur cette voie-là. Chemin faisant, chaque génération saura donner une forme particulière à ses propres rêves de développement pour notre pays.
Propos recueillis par Modeste Mba Talla
PASSATION DE SERVICE AU LYCEE D’ENSEIGNEMENT GENERAL DE SA’A.
A partir de la N3, une bretelle bitumée en direction de l’Est mène dans la petite ville de Sa’a, qui bénéficie d’un Lycée technique dans sa périphérie ouest, et d’un lycée d’enseignement général dans sa périphérie est ; un isolement propice à l’éducation. La ville de Sa’a s’est beaucoup étendue puisqu’il y a trente ans c’était juste un grand village.
Situé au sommet d’une côte, le Lycée d’enseignement général accuse un âge avancé dans sa partie haute avec de vieux bâtiments aux toitures devenues bistres ; par endroits, cette couleur de rouille est brisée par quelques tâches brillantes de nouvelles tôles, signe d’une certaine préparation de la rentrée.
Dans sa partie basse, le Lycée s’est doté de nouveaux bâtiments éclatants, certainement pour répondre à l’explosion démographique. Le terrain de sport collectif sépare les vieux des nouveaux bâtiments. La note discordante sur les infrastructures est le mur d’enceinte effondré sur trois gros espaces de sa façade principale, alors qu’il n’est âgé que deux ans. Il est clair que le constructeur a raté la fondation. La couche d’humus étant profonde dans la zone équatoriale, il fallait enfoncer suffisamment la fondation de mur de 2 mètres de profondeur. L’entrepreneur va-t-il reprendre cet ouvrage déjà réceptionné ? Cet incident n’est pas seulement une perte financière, mais crée aussi un problème de discipline ; les SS auront du mal à empêcher les récalcitrants de fuir les cours et le taux de réussite de 60% aux examens officiels est menacé.
Nous sommes le 10 septembre 2019, deuxième semaine de l’année scolaire 2019/2020. C’est jour de passation de service technique au lycée d’enseignement général de Sa’a, localité de la lékié, région du Centre. Après un an en poste, la Proviseure sortante, Mme ABENA, passe le relais à la Proviseure entrante, Mme SOCPA Jeannette, qui vient du Lycée de Nylon Brazzaville à Douala.
La propreté générale et le balissage de l’allée centrale qui mène au bâtiment Martin Luther King (Provisorat) révèlent que le Lycée attend un hôte de marque, le DDES venant de Monatélé pour installer le nouveau Proviseur. L’arrivée du DDES à 16h30 est bien tardive, alors que les élèves avaient été congédiés, mais pas les professeurs. Un groupe de parents, une forte délégation de Douala d’où vient le nouveau Proviseur et quelques amis venant de Yaoundé ont tenu à ne pas rater l’évènement. A huis clos, le DDES préside la signature des documents dans le cabinet du Proviseur. La partie solennelle de la prise de service se passe dans la grande salle du bâtiment Nelson Mandela. En effet tous les bâtiments du Lycée ont été baptisés des noms des immortels, accompagnés du portrait et d’une citation de chacun (Martin Luther King, Nelson Mandela, René Descartes, Cheik Anta Diop, Mahatma Gandhi, Engelbert Mveng, Martien Towa, Aimé Césaire….) ; une belle manière de montrer aux apprenants la voie à suivre.
C’est un jour après la rentrée des élèves que le MINESEC a nommé les chefs d’établissements scolaires. On dirait qu’il fallait laisser les proviseurs préparer la rentrée sans savoir s’ils seraient mutés, relevés ou appelés à d’autres fonctions. Une certaine logique aurait voulu que ceux-ci soient nommés en août afin de prendre en main les établissements qu’ils doivent diriger. Mais depuis quelques années, ils sont nommés après la rentrée, et cela n’a créé aucun problème à notre connaissance. En tout cas, les administrations scolaires fonctionnant selon la même législation, le problème ne devrait être que celui de l’adaption du nouveau dirigeant dans un nouveau milieu. Maintenant on lui passe le témoin sans troubler le train en marche.
Maurice ZEBAZE, le 10 septembre 2019.
Le Parti pris de KAPTCHE: « Learning to serve »
Cette phrase qui fait office de devise au lycée bilingue d’application de Yaoundé, un des plus anciens établissements secondaires publics du Cameroun, traduit à suffisance le fondement de toute profession et partant de la profession enseignante. Ce slogan est porteur d’un message à double sens.
Premièrement, apprendre pour servir. Il s’agit ici d’une formation initiale qui prépare l’homme à servir. Cette formation est le plus souvent certificative puisqu’elle qualifie la personne à accomplir une tâche précise. C’est cette formation que l’enseignant est supposé donner aux apprenants qui lui sont confiés. Elle doit prendre en compte toute les compétences dont ils ont besoin de construire pour bien servir la société plus tard. Cette première interprétation interroge non seulement le contenu des programmes scolaires mais aussi la qualité de la formation de l’enseignant et plus encore la qualité des enseignements que ce dernier dispense
Deuxièmement, apprendre à servir, autrement dit, se former dans la pratique régulière d’un service de qualité. C’est une formation quotidienne et permanente qui demande une remise en question constante pour rester dans le bon couloir : celui de ceux qui servent bien. Ceci appelle à une probité morale irréprochable et une conscience professionnelle sans faille. Le superlatif employé ici peut sembler utopique, mais c’est un idéal auquel tout travailleur qui aime son métier devrait aspirer.
Ces deux dimensions invitent à une question fondamentale : apprendre à servir pour servir qui ? En réalité, la réponse à cette question détermine le type de travailleur que l’on est. Si on apprend à servir pour se servir, alors on glisse inéluctablement dans le grand gouffre de toutes sortes de vices et de pratiques peu recommandables : avarice, corruption, mercenariat, flagornerie… Par contre, si on apprend à servir pour servir les autres, on se range du côté de ceux, minoritaire aujourd’hui, qui placent l’Homme au centre de toute action. C’est un couloir plutôt étroit où seuls les individus intrinsèquement doués de cette probité dont je fais mention plus haut peuvent s’aventurer. Je parle ici de ceux-là qui ont choisi de céder une part d’eux, de leur bonheur empirique, de ramer parfois/souvent à contre-courant pour le bien-être de tous. C’est une catégorie de personne pour qui j’ai personnellement beaucoup d’estime, car ils ont pour la plupart renoncé à une carrière fleurissante, à un compte bancaire bien fourni, au luxe insolent qu’exhibent certains de manière ostentatoire, pour se pencher sur le devenir de la société. Or toute cette opulence acquise au détriment du service ne procure qu’un semblant de bonheur car rien ne peut compenser la satisfaction que l’on éprouve après avoir accompli son obligation de bien et de justice. Je salue ainsi tous le VRAIS syndicalistes qui ont mené une lutte acharnée pour que nous, jeunes enseignants, ayons droit à un certain nombre d’avantages dans cette profession que l’on qualifie très souvent d’ingrate. Je pense particulièrement aux aînés que je ne veux pas nommer de peur d’en oublier et pour qui j’ai beaucoup de respect. Le chantier reste vaste et les vrais artisans peu nombreux. Rejoignez-moi dans ce vaste chantier pour qu’ensemble nous bâtissions une société plus juste, plus saine et plus sûre !
Un pour tous ! Tous pour un !
Par Désirée Kaptche Deffo
DANFILI DANS Le DJEREM: un paysage scolaire délabré et gaspillé
L’école au Cameroun a mal dans ses infrastructures et équipements. En ville parfois, souvent en zone rurale, les établissements scolaires manquent de tout lorsque les parents sont trop pauvres pour contribuer et les élites trop rares pour se substituer. Dans certains cas, des infrastructures durement acquises se détériorent faute d’entretien et sont abandonnées à la ruine. Et les écoles concernées deviennent progressivement des écoles fantômes. C’est le cas à Danfili, dans le Djerem.
Danfili : un petit hameau rural du Djerem, entre Ngaoundal et Tibati. Plutôt habité si l’on prend en compte les réalités démographiques de la région. Lorsque le train vous laisse dans la petite gare de Ngaoundal au petit matin, les chauffeurs de « clandos », seuls moyens de transport en commun sur la ligne de Tibati, ne vous donnent nullement le temps de photographier l’environnement déjà exotique pour qui s’y aventure pour la première fois. Comme un peu partout sur nos routes de campagne, vous vous retrouvez bientôt comprimés à vous étouffer dans un véhicule de cinq place qui n’a pas peur d’en prendre huit. Et le dur voyage commence. Ici, le bitume, mince croute noire crevassée de mille trous, ne vaut guère mieux que la route de terre ravinée par les torrents. Le trajet est tout en cahots et embardées.
Au bout d’une quarantaine de minutes d’une véritable chevauchée sauvage, nous tombons sur Danfili. A l’entrée du hameau, une plaque crasseuse, rouillée, mille fois écorchée, saute aux yeux, sur le rebord droit de la piste : « Ecoles publiques de Danfili, groupe I et II ». Derrière cette plaque, un spectacle hallucinant de quatre ou cinq bâtiments, que l’on devine jadis fort beaux, aujourd’hui en majorité détériorés, tôles arrachées, bois de charpente noirci et probablement pourri. Deux des bâtiments sont encore relativement utilisables et semblent encore utilisés. Nous sommes là en face d’un véritable gâchis de ressources. Cette école n’a certainement pas été déconstruite en un jour. Mais on a laissé que ceci se produise.
Plus loin, sur la route de Ngaoundéré, nous tombons sur une autre école remarquable : l’école publique de Massiwol. Le patrimoine infrastructurel de celle-ci se réduit à une toute modeste maisonnette aux dimensions de toilette externe d’une demeure normale. Il est évident que, dans ce bâtis, on ne pourrait pas faire entrer plus de quatre bancs. Combien de niveaux et d’élèves comprend cette école ? Difficile à imaginer.
Quelques kilomètres plus loin, notre tacot immobilisé au milieu de nulle part par une crevaison, je tombe sur deux adolescents. J’arrive avec beaucoup de peine à leur faire dire quelques mots en français. « Vous allez à l’école ? » Ils secouent négativement la tête. Une zone de sous-scolarisation ou d’éducation prioritaire. Il doit y en avoir beaucoup dans cette région.
Les réalités scolaires dans l’Adamaoua sont souvent choquantes. D’entières écoles y sont tenues par un seul enseignant qui est généralement le directeur de la structure. Les enfants qui arrivent au secondaire ne savent pour la plupart ni lire ni écrire. Un enseignant avec qui nous avons discuté s’insurge : « A quoi bon faire croire aux gens que l’école primaire existe ici ? Autant attendre l’âge approprié et envoyer directement les enfants en sixième, on ne constaterait aucune différence. »
Roger Kaffo Fokou.
05 OCTOBRE 2019 : Echos de la Journée Mondiale des Enseignants dans la Cités des Arts.
Les lampions se sont éteints le 5 octobre dernier sur près d’une semaine de manifestions organisées à l’occasion de la Journée Mondiale de l’Enseignant dans l’arrondissement de Foumban, par ailleurs chef-lieu du département du Noun.
Dès le vendredi 28 septembre, les membres du SNAES sont allés à la rencontre du nouveau Délégué Départemental des Enseignements Secondaires (DDES) pour le Noun. Comme il est de coutume dans ces circonstances de prise de contact, nous avons tenu à lui transmettre nos félicitations ainsi que celles de la hiérarchie syndicale pour la confiance placée en lui par le MINESEC. De nombreux autres sujets vont meubler les échanges entre les représentants du SNAES et le DDES/NOUN. Entre autres, la situation des enseignants vacataires, celle du personnel de la délégation et surtout l’organisation de la JME/2019 dans la ville de Foumban. Au bout d’un échange courtois et fructueux, le principe d’un discours syndical sera maintenu tout comme le DDES va accepter de parrainer la soirée de réflexion du 4 octobre organisée par le SNAES au Lycée Classique de Foumban.
Le vendredi 4 octobre 2019 s’ouvre dès 6h par une marche sportive menée par le DDES dans les artères de la cité des arts. La soirée de réflexion organisée par le SNAES va effectivement débuter à 15h précises dans la mythique salle de la Réunification du Cameroun, sise au campus du Lycée Classique de Foumban, ceci en présence de Monsieur le Proviseur dudit établissement, représentant le DDES empêché. Les échanges de la table-ronde vont porter sur deux thèmes. Une leçon introductive intitulée « Inconséquence du financement de l’éducation nationale au Cameroun : état des lieux et corollaires » et présentée par le camarade SD du Noun. De l’exposé du Camarade SD, l’on retient que le Cameroun est loin de satisfaire à ses engagements internationaux de 22% du budget national à consacrer au financement de l’éducation. Bien plus, depuis 2011 où le Cameroun a franchi le seuil de 16% du budget consacrés à l’éducation, la courbe ne cesse de baisser d’année en année et se situe autour de 13% en 2019 pour une moyenne africaine de 18%. Cette situation de sous financement de l’éducation est un handicap important pour la chaine éducative avec un impact regrettable sur le traitement salarial du corps enseignant, les infrastructures, le confort scolaire et une forte « pressurisation » des parents.
Le plat de résistance de la soirée a porté sur le thème principal de la JME 2019 « jeunes enseignant(e)s : l’avenir de la profession ». Dans un exposé magistral comme le SNAES/Noun en a l’habitude en de telles circonstances, les camarades DjiotsaTsague et Djoko Kouam vont partager avec l’assistance les graves conditions qui menacent aujourd’hui la profession enseignante au Cameroun et dans le monde. Contrats inadaptés, salaires indécents, violence sur le personnel enseignant, que des droits oubliés qui fondent aujourd’hui le mal-être de la profession, poussant de nombreux professionnels à surfer vers de nouveaux horizons. Cette soirée va s’achever autour de 17h par des échanges fructueux, critiques et très constructifs sur les deux thèmes.
Le troisième acte de cette célébration va s’observer le samedi 5 octobre à la place des fêtes de Foumban où le discours des syndicats, sera longuement applaudi par une assistance conquise. Après ce discours du SD, le Préfet du département de Noun, Monsieur Boyomo Donatien reprendra la parole pour présenter les efforts de l’Etat en matière d’éducation au Cameroun mais surtout, le Préfet va conquérir l’assistance après un discours rassurant sur la sécurité des enseignants dans les campus du département du Noun, ceci devant la multiplication des actes d’agression sur les enseignants dans de nombreux établissements scolaires. C’est sur cette note d’espoir que la célébration de la JME 2019 va s’achever dans la ville Foumban.
Patrick KODJO
AFLATOUN INSTALLE L’EDUCATION SOCIALE ET FINANCIERE A TIBATI
Ce jeudi 17 octobre 2019, la caravane SNAES d’implémentation de l’Education Sociale, Financière et Entrepreneuriale Aflatoun s’est installée à Tibati dans l’Adamaoua. Pendant 3 jours, elle y organise pour une quarantaine d’enseignants représentant autant d’établissements du secondaire un atelier de formation des coordinateurs de clubs d’ESFE.
Tibati est le chef-lieu du Djerem, une coquette agglomération située à deux heures de voiture de Ngaoundal. Le climat y semble très doux, surtout en cette saison. C’est une ancienne ville allemande et l’architecture coloniale y constitue une des plus visibles attractions.
L’atelier d’ESFE, qui se tient dans la salle des fêtes de l’hôtel de ville a pour formateurs le camarade ASSOAH Etoga Roland secondé par l’Inspecteur NKENFON Jean Calvin de la DRES/Adamaoua. Il constitue le premier maillon d’un travail d’extension à plus grande échelle du programme d’ESFE dans la région de l’Adamaoua et dès lundi 21 octobre dans le Nord. D’ici la fin du mois d’octobre, près de 250 établissements d’enseignement secondaire de l’Adamaoua et du Nord seront en train d’implémenter au bénéfice des jeunes un programme visant à les autonomiser à terme dans leur vie en leur permettant de développer ce que les ODD appellent « les compétences du XXIe siècle ».
La Rédaction
Atelier sous – régional de formation des formatrices syndicales
Atelier sous – régional de formation des formatrices syndicales
Du Réseau des Enseignantes d’Afrique Centrale (RESAC)
DOUALA – CAMEROUN
COMPTE RENDU DES TRAVAUX
Le 11/09/2019 à MBAYAVILLE Hôtel Douala-Cameroun, ont démarré les travaux de l’atelier de formation des formatrices syndicales du Réseau des Enseignantes d’Afrique Centrale (RESAC).
La première journée a démarré par l’accueil et l’enregistrement des participantes, ensuite le mot de bienvenue de l’organisation syndicale hôte (le SYNTESPRIC) qui s’est réjoui de la tenue de la session de formation des formatrices syndicales au Cameroun où les jeunes enseignantes syndicalistes en avaient vraiment besoin. Il a regretté vivement toutes les difficultés rencontrées dans l’organisation de la session (formalités de visa d’entrée au Cameroun) et le renvoi des camarades du Rwanda dont l’autorisation d’entrée leur est parvenue en retard. Il s’en est profondément excusé.
A 10h30 la coordonnatrice du RESAC en la personne de Mme NEKEMBAYE HELENE a pris la parole pour souhaiter aussi la bienvenue à toutes les participantes et présenter le programme de la journée.
Dans son propos liminaire, elle s’est excusée de l’absence de la Coordonnatrice chargée des programmes du RAFED. A sa suite, Mme BIKOKO Agnès prenant la parole a présenté l’opportunité et la pertinence des sessions de formation pour inviter les participantes à capitaliser toutes les connaissances qu’elles recevront pour l’épanouissement de nos organisations syndicales. En rappelant que l’IERAF attache du prix à ces sessions de formation syndicale, elle a invité les participantes une fois dans leur pays respectif à démultiplier et à mettre en pratique toutes les connaissances reçues.
Aprèsces interventions, une activité brise-glace constituée des exercices d’étirements, des petits chants accompagnés des mouvements d’ensemble a été menée et la présentation des participantes des six pays représentés (Burundi, Gabon, RCA, Tchad, RDC, CongoBrazzaville et le Camerounpayshôte) a clôturé cette première partie.
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- DES OBJECTIFS DE L’ATELIER
L’atelier commence véritablement par la présentation de ses objectifs qui sont :
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- Partager les informations entre les participantes,
- Améliorer les connaissances de 18 activistes syndicales sur les principes de formation des adultes,
- Renforcer les connaissances des participantes sur les méthodes et techniques de formation des adultes,
- Accroître les compétences des participantes en préparation et animation des sessions de formation
- Améliorer les compétences communicationnelles.
- DES ATTENTES DE L’ATELIER
- La bonne maîtrise des principes de base de l’andragogie ;
- La connaissance solide sur la méthodologie et les techniques de formation des adultes ;
- La préparation et la présentation d’un thème de formation ;
- La maîtrise des différentes étapes pour une section de formation des membres des syndicats ;
- La diffusion des informations sur le réseau des femmes et la discussion sur la question du genre.< /li>
- DES PRESENTATIONS
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- La première présentation porte sur les syndicats du secteur de l’Education
Il s’est agi pour la camarade Helene Nekarmbaye de définir ce qu’est l’Internationale de l’Education (IE), ses initiatives (résolutions, conférences mondiales des femmes, réseaux des femmes, plan d’action pour l’égalité des genres). La présentatrice a indiqué que l’IE est la centrale syndicale des travailleurs du secteurs de l’éducation. Elle est une confédération qui regroupe près de 402 syndicats dans le monde pour près de 32 millions de membres.Le RAFED entendu comme le réseaudes femmes africaines en éducation est constitué de 4 réseaux (le RESAO, Le RESAC, le SAWEN, le WAWEN). Il a pour principal rôle de renforcer les capacités des femmes dans tous les domaines, de réduire les obstacles liés à l’accès des femmes dans les différents postes de responsabilité.
Le RESAC mis en place dès 1994 par l’IERAF, est le regroupement des comités locaux des femmes des pays de la sous-région Afrique Centrale. Tout ceci s’organise comme suit :
Cette partie s’est soldée par des échanges qui ont permis aux participantes d’être mieux éclairées.
Après la pause déjeuner, la camarade BIKOKO Agnès a procédé à la deuxième présentation sur le thème : « les femmes dans les organisations syndicales ».
Elle a commencé par nous rappeler la définition du syndicat qui est une organisation libre et démocratique des travailleurs unis dans le but de défendre et de faire progresser leurs intérêts politiques, économiques, sociales et communs. Ellesouligne dans son propos entre autres, les objectifs d’un syndicat et surtout le financement des syndicats qui passe par les cotisations, les droits d’adhésions, les dons, les legs, les subventions et surtout les ressources provenant d’activités génératrices de revenus.
Elle termine son propos en rappelant les types de syndicats qui existent dans le monde. Le type latin centré sur les grèves, les revendications ; le type scandinave qui était centré sur l’éducation et la formation et enfin le modèle du bloc soviétique qui avait pour fonction l’encadrement pour amener les unes et les autres à identifier le type de syndicalisme dans leur pays.Après cette présentation, La dernière activité de la journée est axée sur les travaux en ateliers. Deux groupes sont constitués : le premier avait pour thème de réflexion« les obstacles liés à la participation des femmes dans les syndicats » le deuxième avait pour thème « la promotion de la participation des femmes dans le syndicat ».La restitution des travaux en atelier ont permis de relever les données ci-après :Des obstacles
Ils se situent à cinq niveaux- Au niveau individuel:(la femme est égoïste, elle manque de confiance en soi, n’a pas conviction).
- Au niveau familial: les charges à supporter, (celui de mère, épouse et travailleuse)
- Au niveau professionnel: la peur de l’employeur, la perte de son emploi et de ses privilèges
- Au niveau sociétal: le poids et le regard de la société, les us et coutumes
- Certaines pratiques religieuses
- Et le harcèlement sexuel.
Pour surmonter ces obstacles, le deuxième groupe a pensé qu’il faut :
Promotion du syndicalisme des femmes
- Cibler les femmes et les sensibiliser
- Les éduquer, les former, les informer
- Et enfin les responsabiliser au sein des syndicats
C’est sur cette restitution que la première journée s’est achevée à 18 heures.
La deuxième journée a démarré par la lecture du rapport de la première journée suivie des commentaires, de son amendement et de son adoption. La Camarade Hélène Nekarmbaye annonce l’ordre du jour et revient, en attendant l’arrivée de la Coordinatrice des Programmes Anaïs Dayamba, sur les initiatives de l’IE pour d’amples explications afin que ses différents organes et son fonctionnement soient maîtrisés. A la fin de ce rappel, une troisième présentation est faite par la Camarade Bikoko Agnès sur le thème « la Communication ».
- Tour à tour elle :
– définit le terme communication,
– relève les différentes composantes, les types de communication ainsi que les barrières à la bonne communication.
La dernière partie de la présentation se penche sur les différentes compétences communicationnelles au rang desquelles, la prise de la parole, l’écoute active, la facilitation, la présentation, la rédaction. Elle ajoute pour terminer, les techniques de ciblage afin que la communication puisse atteindre son but.Un exercice pratique s’en est suivi demandant aux participantes de préparer un thème de formation en 10 mn et le présenter en 5 mn. La restitution permet de faire des observations sur le contenu, l’attitude de la formatrice ainsi que la prise de parole. Les trois groupes se sont soumis à cet exercice que les participantes ont beaucoup apprécié car, les remarques faites les ont édifiées. C’est sur cette restitution que prend fin la deuxième journée.
La troisième journée quant à elle avec ses quatre grandes articulations inscrites à l’ordre du jour commence par la lecture du rapport de la deuxième journée, suivie des observations et commentaires, de son amendement et son adoption.
Les travaux en atelierssur la formation des adultes constituent la deuxième articulation de cette journée. Le travail demandait aux participantes de définir ce qu’est un adulte et d’énumérer cinq caractéristiques au moins d’un adulte.
La restitution des travaux des différents groupes amène la coordinatrice des programmes à procéder à la première présentation de la journée sur la formation des adultes. Elle précise que cette formation a pour but de donner des connaissances sur le concept, le mode d’apprentissage basé sur la réalité de la vie (la pédagogie participative, la responsabilité collective, la pédagogie de travail, le pragmatisme, le réalisme…) Dans la suite de son exposé elle évoque tour à tour le rôle du formateur, les compétences d’un bon formateur, les méthodes de formation (activeou participative, méthode passive, méthode interrogative), les différentes techniques de formation à savoir le tour de table, la discussion en panel, les assauts d’idées, l’étude des cas, Phillipe Six-Six, la simulation, le jeu de rôle, les questions/réponses, arrêt bus, l’aquarium, la table-café…
Pour aborder les troisième et quatrième point de l’ordre du jour, un exercice est donné et trois groupes constitués pour travailler sur la préparation d’une session de formation. La présentation des travaux des différents groupes suivie des commentaires et remarques amènent la coordinatrice à parler de la préparation d’une session de formation.
Dans son propos, elle indique qu’il faut être précis dans ce qu’on veut faire, définir des objectifs SMART. Elle termine son exposé par des recommandations (toujours évaluer à la fin d’une formation, décrire les obstacles et les problèmes restant à résoudre. La journée prend fin à 19 heures 20 mn.
La dernière journée du 14 septembre commence avec la lecture du rapport de la troisième journée, son amendement et son adoption. Ensuite un travail en atelier est organisé sur l’utilisation des TIC dans la formation. Deux groupes sont constitués et les facilitateurs présentent l’application PowerPoint en énonçant son rôle, puis démontrent la procédure de création des diapositives et d’animation des diapositives. Les participantes montrent beaucoup d’intérêt à cette activité et il leur est demandé de poursuivre cette initiation dans leur pays respectif.
La dernière présentation de la session est faite ensuite par la chargée des programmes sur la Gestion axée sur les résultats (GAR). Son propos s’articule autour de la définition du concept, des principes de la GAR, des étapes de la planification selon la GAR. Elle donne ensuite un exercice sur la planification des activités selon la GAR.
La restitution des travaux des groupes commence avec la présentation du Congo Brazzaville et du Tchad, suivie de celle de la Feser. Le rendu de RDC et du Burundi s’ensuit et celle de Syntespric clôture cette phase. Ces différentes présentations se trouvent en annexe.
A l’issue des quatre jours des travaux, Les résolutions suivantes ont été prises :
- Les femmes s’engagent dans leurs organisations respectives à former chacune au moins 20 femmes à l’issue du premier trimestre de l’année scolaire 2019/2020,
- Les formatrices formées démultiplient cette formation
Plusieurs recommandations sont formulées :
- Créer dans chaque organisation un comité de suivi de cette formation,
- Créer un groupe WhatsApp pour garder le contact et ventiler les informations,
- Que les Secrétaires Généraux respectent les critères de choix des participants aux sessions de formation afin de garantir un impact significatif des acquis,
- Créer un groupe WhatsApp des formées pour s’entraider
La cérémonie de clôture commence à 16h 30 par l’évaluation de la session de formation, suivie de la lecture des résolutions et recommandations ensuite du compte rendu des travaux de l’atelier. Anaïs Dayamba Coordinatrice Chargée des Programmes prend la parole pour inviter les participantes à ne pas dormir et à travailler pour la relève du mouvement syndical dans la sous-région Afrique Centrale et de mériter la confiance qui a été placée en elles. Le Camarade Président Luc NYOMOG de SYNTESPRIC prend la parole à son tour pour remercier l’IERAF pour la confiance accordée au Cameroun, et de la qualité de la formation dispensée. C’est à 16h 45 qu’il clôt le séminaire-atelier de formation des formatrices syndicales du RESAC à Douala au Cameroun avec un chant de ralliement (« Solidarité à jamais….).
Fait à Douala, le 14 septembre 2019
Le rapporteur
BOMBO Berthe (SNAEF/FESER CAMEROUN)
MOTIVATION, TEACHING PROFESSION AND UNIONISM
ByDésirée KAPTCHE DEFFO
Motivation can be defined as the reason why somebody does something or act in a particular way. It is a feeling of enthusiasm, interest or commitment toward what we have to do. Motivation is the force that helps one to move a mile further or to invest oneself to the fullest in whatever one is doing. Therefore, motivation is the key to any successful activity in life including teaching. Motivations are of different kinds and nature and they can be seen from different angles. Looking closely into the matter, we can ask the following questions. What type of motivation does a teacher need to be committed to his profession? How can motivation help in increasing the level of commitment into unionism?
Everyone needs motivation. From children to adults, from the common house help to the head of state, for it takes everyone a good amount of strong will (internal force) and an external force to get up in the morning and attend to his / her duties. If babies as young as six months needs to be flattered in order to crawl what more of adult teachers? The right question here is what type of motivation do we need as teachers to be committed to the teaching profession? Let’s consider the analysis in the two above mentioned perspectives.
The internal force is that which leads a teacher to want to give in his possible best and to want his best to be enough for the purpose. To better understand this we have to question the purpose. First the purpose of choosing the teaching field rather than any other one: Why did you go to higher teacher training college rather than ENAM, POLYTECH, EMIA, IRIC, ASTI among other prestigious professional schools in this country? Second the purpose of going in for the best? What is the best for you? For the students?For other teachers?For the school environment?And for the society? So finally, what drives you out every day to your job site and makes you feel sad when you haven’t achieved your goal in a particular class, when you haven’t played your role in a particular school and when you didn’t act in time in a particular community as a teacher is what we call internal motivation.
The external force concerns the measures put in place to enable you achieve the best both in your profession and in your life. In this vein the Cameroon constitution and the rules and regulations governing the education field are the main resources that can gear you towards the right path. After loving your job and giving in your possible best for the profession you expect the other stake holders to consider your input and treat you accordingly. At this particular stage, you are at the junction between your inner monsters and the commitment for a just cause. Since the public powers and the government almost always stand as an oppressive force. There is few alternative left for the committed teacher that you are : either lying low and keeping a low profile, or stand for who you are and join a union.
At this juncture, the choice remains, yours but remember: If you don’t stand for your rights, no one will.